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BRUXELLES D'ANTAN, D'AUJOURD'HUI ET DE DEMAIN
De coups de cœur en coups de gueule...l'histoire, le patrimoine, les anecdotes insolites, les petits secrets, les découvertes, les curiosités, les grands projets et les actualités qui rendent notre ville vivante, passionnante et attachante mais aussi parfois complètement surréaliste.

jeudi 26 septembre 2013

C comme Chicon - B comme Bruxellois de naissance


Entre la dénomination "Chicon", utilisée en Belgique et dans le nord de la France, et la dénomination "Endive",  utilisée dans le reste du monde francophone, on s'y perdait déjà un peu. Les producteurs flamands, qui en sont les plus gros exportateurs, préfèrent l'appellation "Witloof" qui, par sa consonance anglophone, est bien perçue sur le plan international. En langage ancien, on l'appelait aussi "Barbe du Capucin" ou "Chicorée de Bruxelles.
A l'instar de ce politicien anversois bien connu qui abuse des citations latines, on pourrait aussi parler de "Cichorium intybus foliosum Hegi"...quoique ce soit un peu difficile à replacer sur un menu ou dans une conversation gourmande.
Retour aux origines de la success story
Si une variété à grosses racines de cette plante est cultivée depuis le XVIIème siècle pour la production d'un succédané du café (La célèbre "Chicorée"), une autre espèce voisine était déjà connue depuis l'antiquité pour produire de délicieuses salades vertes ("Scarole" et "Frisée"). Le chicon n'apparaît pourtant sous sa forme actuelle qu'au 19ème siècle.


De sa naissance par surprise dans la "Vallée Josaphat"...
C'est un peu par hasard que notre "Chicon national" aurait été découvert dans la vallée Josaphat vers les années 1830. En ces temps troublés où la Belgique se bat contre ses voisins  pour conquérir son indépendance, un paysan schaerbeekois cache sa récolte de racines de chicorée dans le recoin le plus sombre de sa cave pour la protéger du vol. Trois semaines plus tard, il constate avec surprise que des feuilles toutes blanches (witloof) sont apparues au bout des racines.  
A sa naissance officielle au Jardin Botanique de Bruxelles
Cette p'tite histoire n'est peut-être qu'une jolie légende...par contre, c'est bien  Franciscus Bresier, le jardinier en chef du Jardin Botanique de Bruxelles, qui met au point la technique du "forçage" en cultivant ces racines l'hiver, recouvertes de terre, à l'abri de la lumière et du gel. La première culture du chicon de pleine terre à des fins commerciales est née en 1867; la paternité en revient à Jef Lekeu, un cultivateur bien inspiré d'Evere.
Douze ans plus tard, le premier cageot d' "Endives de Bruxelles", est vendu aux Halles de Paris : c'est le vrai point de départ de sa  future et brillante carrière internationale.


En passant par la commune d'Evere

Au tout début du 20ème siècle, la grande crise agricole,  sonne le glas des cultures céréalières (Orge, blé, seigle et froment) entre la vallée de la Senne et celle de la Woluwe. Les agriculteurs locaux sont obligés de se reconvertir et transforment leurs champs en potagers.  Au fil du temps, la culture du Witloof (qui s'exporte jusqu'aux Etats-Unis), y prend de plus en plus d'ampleur au point de faire vivre pratiquement toutes les fermes des alentours. 
Evere reste un "village de maraîchers" jusqu'au début de la seconde guerre mondiale. Dans les années qui suivent  la libération, hectare par hectare, ils sont inexorablement chassés du "Geuzenberg" (*) pour cause d'urbanisation galopante
Bien qu'il y ait belle lurette qu'on ne produise plus de chicons en Région bruxelloise, il reste cependant solidement ancré dans nos traditions culinaires.
En mémoire des heures de gloire de "l'Endive de Bruxelles", la commune d'Evere abrite toujours la folklorique "Confrérie des Compagnons du Witloof" dont le "costume" est venu rejoindre l'imposante garde-robe du Manneken Pis, conservée au Musée de la Ville de Bruxelles.

Jipé

(*) Le "Geuzenberg" est un "lieu-dit" situé sur le plateau de Loo qui sépare la vallée de la Senne et celle de la Woluwe - la dénomination n'a aucun rapport avec la célèbre bière "Gueuze" mais se traduit par "Colline des Gueux".

Pour nos visiteurs qui veulent en savoir plus sur le chicon-witloof, son utilisation en cuisine, ses recettes ainsi que ses qualités "Santé": lire la suite de l'article complété sur le blog "Itinéraires de Gourmets" (CLIQUER ICI)


La petite histoire compliquée d'une fermette de la fin du 19ème siècle,  perdue au milieu des buildings
1991
Président-fondateur du cercle d'histoire d'Evere, artiste-peintre à ses heures et ex-policier, Christian Stevens fait l'acquisition d'une petite fermette datant de 1891. Située derrière la maison communale d'Evere (Rue Leekaerts,29), on ne sait trop par quelle miracle elle a pu survivre au milieu des buildings qui l'entoure. Quoi qu'il en soit, c'est le seul vestige rescapé des cinq exploitations maraîchères qui étaient situées à cet endroit. 
Très rapidement, le propriétaire décide d'y installer un petit "musée-galerie-estaminet" en l'honneur du chicon. On pouvait notamment y retrouver  le matériel et les outils cédés par Jules Heymans (le dernier cultivateur de witloof du coin) et y déguster quelques préparations traditionnelles du fameux légume en compagnie d'une bonne Kriek. 
2006 - Fin de l'aventure
Désireux d'aller s'installer sous les cieux plus cléments du sud de la France, Christian Stevens revend le terrain, la fermette et son contenu à la commune pour la "modique" somme de 500.000 €. Laissée vide durant 3 ans, faute de budget pour la rénover (elle sert juste d'espace "à louer" pour de petites fêtes et réunions privées), elle accueille finalement un sympathique bistrot-resto "éphémère" qui a connu son franc succès. (L'ex- "Ferme aux chicons")
2013 - Restaurant "Un goût de chez nous"
A nouveau laissée à l'abandon durant tout un semestre, la fermette du Geuzenberg  a repris vie le 1er août, sous la houlette d'une nouvelle équipe enthousiaste et sous un nouveau nom qui affiche clairement ses ambitions. Dans l'esprit "Slow Food", le concept des tapas "à la Belge" permet de déguster plusieurs petits plats s'inspirant de recettes traditionnelles et cuisinés à partir de bons produits sélectionnés exclusivement dans le terroir national.
Un lunch du midi à 9,50 € et des tapas variés entre 6 et 9 €...qui dit mieux ?
Une rénovation complète du bâtiment est programmée par la commune en 2015. "Un goût de chez nous" espère pouvoir réintégrer les lieux après les six mois de travaux prévus mais ce n'est pas encore confirmé. Raison de plus pour  les encourager et aller leur rendre visite au plus vite. (Ouvert midi et soir, du mardi au vendredi - uniquement en soirée le samedi)
www.ungoutdecheznous.be

samedi 7 septembre 2013

L'Eldorado bruxellois - Un siècle d'histoires sur l'écran




Pour la petite histoire...
Des années 1900 aux années 2000

1907 - 1933
S'il est né en 1933, l'Eldorado s'est installé à l'emplacement d'une salle existante, le "Cinéma Américain", apparu sur la place De Brouckère au tout début du siècle (le premier permis de bâtir date du 07/11/1906  - Ouverture en 1907). Rebaptisé "Cinéma des Princes" (permis de bâtir 30/10/1915 - Ouverture en 1916) il est ensuite repris par Monsieur Marlant (déjà propriétaire du Cinéma des Galeries et du Victoria Palace) qui décide de le transformer complètement et confie le projet à l'architecte Marcel Chabot. Les travaux sont d'importance et s'étalent sur plus de deux ans (De 1931 à l'été 1933). Le cinéma occupe dorénavant toute la profondeur du pâté de maison, jusqu'à la rue de Laeken. La grande salle de 2.750 places, drapée dans ses décors théâtraux d'inspiration africaine, va connaître ses années de gloire.



Photo de gauche: film à l'affiche  "La Garçonne" réalisé par Jean de Limur - Sorti en 1936
(Avec Marie Bell, Arletty, Edith Piaf...musique Jean Wiener)
Photo de droite: film à l'affiche "Le dernier des 6" réalisé par Georges Lacombe - Sorti en 1941
(Avec Pierre Fresnay, Suzy Delair -  Scénario d'après l'écrivain belge Stanislas-André Steeman)
Enttre ces deux dates, la façade et l'entrée de l'Eldorado ont été complètement transformées

1938
Cinq ans à peine après son inauguration, sous la houlette de ses nouveaux propriétaires (La société qui a fait construire et exploite le célèbre cinéma REX d'Anvers, considéré à l'époque comme l'une des plus belles salles d'Europe), il est à nouveau remis en chantier.
Cette fois, il ne s'agit pas de toucher à la salle, les travaux confiés à l'architecte Léon Stynen concernent le réaménagement de la façade, l'accueil et les guichets, le foyer et les vestiaires ainsi que les escaliers d'accès aux balcons.
Encadrée par deux imposants piliers de soutènement habillés de granit, la nouvelle entrée est monumentale. Telle une "bouche béante", elle est très largement ouverte sur la place, pavée de mosaïque et surmontée d'une grande marquise débordante. Un hall intérieur chaleureux, recouvert de tapis rouge, se dévoile à travers les portes vitrées et le grand escalier, qui prend son départ à l'extérieur, semble inviter les passants à monter directement aux balcons. Dans le foyer, en face des vestiaires, le mur accueille une fresque peuplée d'arlequins et de funambules stylisés, peinte par l'artiste Julien Van Vlasselaer (1907-1982).
Ce bel exemple "d'architecture-marketing" vise à capter le regard des chalands et à les attirer directement dans l'entrée sans qu'ils doivent franchir le barrage d'une porte.
L'Eldorado profite de la visibilité exceptionnelle sur cette place très fréquentée pour mieux concurrencer le superbe cinéma Métropole qui a été inauguré en 1932, dans la rue Neuve toute proche.

Film à l'affiche : "L'adorable voisine" avec James Stewart
Réalisé par Richard Quine (USA) - Sorti en Europe en 1959

Photo de gauche : "Le retour des 7 mercenaires" avec Yul Bryner
Réalisé par Burt Kennedy (USA) - Sorti en 1966
Photo en haut à droite : libération de Bruxelles en septembre 1944
Les camions de l'armée américaine stationnent devant le cinéma Eldorado

Une guerre mondiale et trois décennies plus tard, la face du monde et celle du cinéma ont bien changé. Dès la fin des années 60, les grandes salles uniques ont de plus en plus de mal à faire le plein de spectateurs sur une seule affiche. En parallèle, la production cinématographique s'est démultipliée . La tendance commerciale est dorénavant de proposer un choix de plusieurs films programmés dans différentes salles situées au même endroit.

1974
Le saccage iconoclaste...
En dédoublant l'espace avec une salle à l'étage (au niveau des balcons) et d'autres au rez-de-chaussée, les travaux de transformation amputent irrémédiablement la partie inférieure des bas-reliefs, sans le moindre respect pour l'œuvre d'origine. Les sculpteurs Wolf et Van Neste ont dû se retourner dans leurs tombes respectives . Ô Miracle, ces "architectes-décorateurs" iconoclastes n'ont pas jugé utile de les détruire complètement et ils ont même daigné conserver les ornementations du plafond (Sans doute par souci d'économie...pour ne pas devoir refaire du neuf). 

1977 - 1978
Trois ans plus tard, il annexe son voisin, le cinéma SCALA, et subit une nouvelle transformation hasardeuse, on lui adjoint une huitième salle et le hall d'entrée est, une fois de plus, modifié. Mais on est bien loin des grandes ambitions architecturales et décoratives des années 30.
L'Eldorado y a définitivement perdu son âme.

1991
Triste fin d'une longue aventure ?
Depuis que son concurrent historique, le fameux "Cinéma Métropole", a fermé ses portes en 1982, sacrifié sur l'autel du commerce (Son hall d'entrée était orné d'une superbe fresque du célèbre sculpteur russe Ossip Zadkine); c'est l'un des derniers "vestiges" des prestigieuses salles de cinéma bruxelloises d'antan. Neuf ans plus tard (le 8 janvier 1991) c'est à son tour de mettre la clef sous le paillasson.

RENAISSANCE...







1992
Déjà propriétaire de l'Acropole (UGC Toison d'Or) dans le haut de la ville, le puissant groupe français cherche à renforcer sa position à Bruxelles. Il rachète le défunt Eldorado et s'engage à lui donner un nouveau souffle en le rénovant complètement.
En donnant naissance au complexe moderne de 12 salles que nous connaissons actuellement, les dirigeants d'UGC vont aussi s'attacher à sauver ce qui peut encore l'être de la majestueuse salle de 1933.
Non seulement les bas-reliefs et les ornementations du plafond ont été préservés mais ils ont fait l'objet d'une restauration de qualité et d'une mise en valeur par l'éclairage...qu'il faut saluer.

1994
L'ensemble de la salle et des décors ont d'ailleurs été honoré d'un classement par la commission des Monuments & Sites en avril 1994; la "belle au bois dormant" s'est subitement réveillée...mais 20 ans trop tard !

Entre le petit "Cinéma américain" des débuts et la salle du "Grand Eldorado" d'aujourd'hui, en un peu plus d'un siècle, combien d'histoires comiques, dramatiques ou romantiques, n'ont-elles pas défilées sur l'écran ? N'est-ce pas un peu ça aussi...la magie perpétuelle du cinéma ?
Jipé